La migration bat maintenant son plein, avec un nombre croissant de Balbuzards qui ont traversé la Suisse depuis fin juillet. Une fois en route vers le sud, les jeunes réalisent tôt ou tard qu’ils ne peuvent plus compter sur leur père pour les nourrir, et qu’ils doivent apprendre à pêcher par eux-mêmes. Chaque année à cette époque, certains de ces oiseaux font escale pour des périodes plus ou moins longues en des lieux où ils peuvent se reposer et perfectionner leurs facultés de pêche. En Suisse ils comprennent, selon l’année, des sites comme Chavornay (VD), le Fanel (BE) et le Chablais de Cudrefin (VD), le lac de Bret (VD), le lac de la Gruyère (FR), Auried (FR), le Wohlensee (BE), et plus loin Klingnau (AG), Flachsee (AG), Mauensee (LU) et les Bolle de Magadino (TI).
Les 19 et 20 août, deux Balbuzards nés cette année, le premier un oiseau non bagué d’origine inconnue et le second portant une bague allemande, on fait escale sur le territoire d’Olympe (F28) à la Grande Cariçaie, clairement attirés par sa présence et par deux plateformes de nidification installées par le projet. L’oiseau allemand a été photographié sur l’un d’eux le 20 août par piège photo, permettant ainsi de lire sa bague. Il a été revu, portant un poisson, au Chablais de Cudrefin le 31 août, soit 11 jours après que nous ayons pensé qu’il était parti.
Le jeune non bagué, clairement un mâle, s’est approprié les deux plateformes de nid d’Olympe de son arrivée le 19 août jusqu’au 26. Bien que nous l’ayons vu essayer de pêcher, il a vite compris qu’il existait un moyen plus facile d’obtenir un repas – en faisant appel aux instincts paternels d’Olympe. Après avoir eu deux partenaires femelles successives plus tôt cette saison (qui sont entretemps parties), Olympe semblait perplexe lors de la soudaine apparition de ce bruyant juvénile. À plusieurs reprises, il lui a apporté un poisson au nid, que le petit futé a vite saisi pendant qu’Olympe le regardait manger depuis un perchoir voisin. Le 23 août, une femelle adulte non baguée (photo dessus) est apparue, se joignant brièvement à cette sorte de « famille recomposée ». Tout observateur tombant par hasard sur cette scène aurait facilement pu croire qu’une nidification s’était produite ici, alors qu’il s’agissait juste d’un fascinant chapitre de plus dans la saga du retour de l’espèce dans la région. Qui sait si ces jeunes oiseaux, pour autant qu’ils survivent à leur première migration, ne reviendront pas visiter le secteur à l’avenir?
La femelle adulte de passage n’est restée que deux jours (23 et 24 août), coïncidant avec une autre surprise: la venue d’Arthur (F12), qui avait momentanément délaissé son territoire de Hagneck au lac de Bienne. Cela a provoqué un peu de stress pour Olympe, le « propriétaire » du site, avec des poursuites aériennes et des vols acrobatiques ajoutant à l’animation générale. Cependant, une fois repartis la femelle et le jeune non bagué, les choses sont revenues à la normale, et Arthur a été vu de retour sur son propre territoire à Hagneck. Au 31 août, nos trois mâles territoriaux Arthur, Olympe et Racine (F29), étaient toujours dans la région des Trois-Lacs, leur départ vers le sud étant attendu tout prochainement.